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Fleet Foxes : Crack-Up

Fleet Foxes
Crack-Up

Nonesuch, 2017

Les amateurs de folk commençaient à désespérer mais peuvent maintenant se réjouir. Le hiatus de Fleet Foxes est terminé. Le groupe, originaire de Washington, brise près de six ans de silence avec Crack-Up, son troisième album studio. Un retour plus que bienvenu, qui fait du bien à l’âme et qui invite au recueillement.

L’album aurait très bien pu ne jamais voir le jour. Après Helplessness Blues, la deuxième offrande de Fleet Foxes, le chanteur Robin Pecknold a voulu tout arrêter pour se ressourcer, étouffé par le succès, la tournée et le climat de New York. Cette anxiété sociale l’a poussé à prendre du recul et à revoir la trajectoire de sa vie pour éviter de «craquer». Il a complété un doctorat en études anglaises et a fréquenté le monde littéraire, et ça s’entend sur Crack-Up. L’album cumule les références érudites et les analystes se creuseront longtemps la tête pour tout détecter tant le filon y est riche.

Bien que ce troisième album soit signé par Fleet Foxes, c’est bel et bien sous la plume de Pecknold, reclus, que ces nouvelles chansons ont pris vie. Ainsi, Crack-Up est en quelque sorte à l’image du chanteur : complexe, plein d’incertitudes et constamment à cheval entre le rêve et la raison, entre la solitude et l’amitié, entre le calme et la tempête…

L’œuvre reste néanmoins cohérente, tant dans ses arrangements, dans son propos, que dans ses thématiques. Elle relate, en quelque sorte, l’histoire d’un groupe musical qui s’est brisé et qui se reforme lentement mais sûrement. Elle évoque le désir des musiciens de Fleet Foxes de se retrouver et de créer ensemble.

Crack-Up commence doucement avec les premières notes de I Am All That I Need, qui marque une continuité directe avec Grown Ocean, le dernier morceau de Helplessness Blues. Cette pièce d’ouverture se décline en trois temps. Le folk y est tantôt plus dépouillé, tantôt plus grandiloquent. Ainsi, le groupe met bien la table pour ce qui nous attend: un album progressif, où les morceaux s’imbriquent les uns dans les autres et où le rythme fluctue, tout comme la vie.

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«How could it all fall in one day?», se demande Pecknold sur la jolie pièce If You Need To, Keep Time On Me, évoquant encore une fois les querelles internes au sein de son groupe et les moments de cassure avec son existence. L’angoisse, l’incertitude et l’anxiété transcendent les morceaux. Elles prennent la forme de plusieurs symboles qui reviennent constamment sur l’album. Bien que ceux-ci soient quelque peu clichés, ils sont néanmoins utilisés avec parcimonie.

Plusieurs superbes morceaux, comme Kept Woman ou Third of May / Ōdaigahara, imposent le respect par la richesse de leurs arrangements, les prouesses musicales de l’ensemble du groupe et, surtout, parce qu’ils prennent le temps qu’il faut pour nous faire voyager.

C’est d’ailleurs la principale force de Crack-Up : prendre le temps pour s’exprimer, pour se retrouver, pour se ressourcer… Ainsi, le hiatus aura été bénéfique, il aura permis à la formation de concevoir des morceaux complexes, riches et dépouillés de tout artifice superflu.

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