Ils remanient les archives, les réécrivent à leur main sur ce disque qui cite Apollinaire au passage, ce même poème qu’avait jadis chanté Ferré. Il y a certes le devoir de Souvenir, cette voix qui rappelle Dutronc, le spectre de Barbara qui vole au-dessus d’Erussel Baled (Les ruines), quelque chose de Gainsbourg ne serait-ce que dans le nom. Les influences, ostentatoires, sont multiples, mais Feu! Chatterton les concassent pour en créer une nouvelle mixture dont eux seuls connaissent toutes les épices.
Cette fois encore, le groupe enivre de ses mots et dès la plage 1, véritablement document ASMR, des strophes chuchotées qui chatouillent nos sens. Vient ensuite l’accrocheuse Grace, ses couplets minutieusement rédigés, ce micro qui distortionne à la prononciation du prénom homonyme comme pour appuyer l’émotion brute qu’incarne Arthur Teboul – l’âme du groupe. Aucun détail n’est laissé au hasard chez ces rockeurs francophones trop forts pour leur ligue, pas même le glockenspiel de la cinématographique Ginger qui confère à cette fuite désespérée mais romantique un soupçon d’espoir et de lumière. Tous les arrangements sont bien pensés, élaborés et vont bien au-delà de l’exercice de style rétro.
On fantasme aussi à l’idée d’un vidéoclip qui mettra en images Tes yeux verts, une complainte bonifiée de cordes, de bois, d’une énumération d’objets et de lieux qui nous ramène à l’autre dans un sempiternel pincement au cœur. Cette chanson, comme tant d’autres sur cette seconde offrande, est un tour de force.
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