Gratitude, inquiétude, repentance. Hyper-critique de sa propre perception du monde, entre la psychanalyse des rêves et un propos quasi politique qu’on ne lui connaissait pas, le plus brillant parolier pop des USA poursuit son combat permanent contre l’inconscience intérieure. «People hungry for the voice of God hear lunatics and liars», dit-il. Cette quête de soi souvent menée de concert avec la découverte d’un nouvel espace musical n’a quasiment rien de tiers-mondiste mais puise cette fois-ci ses ébouriffages à travers les bidouillages électroniques luxueux de Brian Eno, qui dramatise un lyrisme exigeant avec une poignée de pointures discrètes: Gadd, Laboriel, Frisell, Hancock. Hard Times, répète Simon, peu de révélations, peu de mélodies simples pour cette époque ambiguë. La seule certitude réside dans l’amour de ses petits, adoptés de partout, dont le fredonnement sur Father and Daughter, chanson d’un autre temps, rappelle qu’après un demi-siècle d’idéalisme, pour l’auteur de Sound of Silence, l’Amérique n’est plus à découvrir mais reste encore à élever, et donc, moralement, à faire.
Guide albums
Paul Simon
Surprise
Warner Music, 2006