Sérieusement, on devait être 40, 45 au maximum. C’était en 2001, il y avait Electric Wizard en ouverture. C’était la première fois que je voyais Enslaved en concert. Il n’y avait pas beaucoup de monde mais je sentais que ceux qui n’y étaient pas manquaient quelque chose. Par la suite, Enslaved nous a revisités. La fois la plus notable demeure leur visite en ouverture d’Opeth. À ce moment, le groupe s’est retrouvé devant un public plus nombreux et c’est à partir de là qu’Enslaved a connu sa première véritable explosion en ce qui concerne une certaine popularité en Amérique.
Le groupe se retrouvait devant un grand nombre de personnes chaque soir. Ce qui fait que, par la suite, les gens ont découvert les albums de la troupe norvégienne et lors de leur tournée suivante, les salles se voulaient plus remplies que lors de leur tournée précédente en tant que tête d’affiche.
Maintenant, après de nombreux albums grandement encensés par tous, Enslaved déplace un bon lot d’amateurs. Que ce soit le friand de black métal complexe, l’amateur de progressif plus acidulé ou l’amoureux de métal qui aime les groupes qui jonglent avec les styles, Enslaved ratisse largement dans ce feuillage musical. Les années, le travail acharné et les tournées ont été généreux avec Enslaved qui a maintenant un public qui lui est propre. Vendredi, aux Foufounes, tu pouvais t’en rendre compte aisément.
En sollicitant les gens pour un vendredi, il est certain que les métalloïdes vont prendre le temps qu’il faut pour se rendre au concert. En sachant qu’il y avait un groupe en ouverture de Yob, cette annonce laissait le temps d’aller prendre un pot entre copains, en plus de la grignotine d’usage.
Nous étions donc sur place pour la prestation de Yob. Après avoir esquivé le plafond coulant, juste sous les douches des loges à l’étage supérieur, nous avons pu nous rendre au comptoir des marchandises pour se rendre compte qu’Enslaved et Yob avaient une panoplie d’items en vente, surtout en ce qui concerne les vinyles.
Le trio de doom américain Yob a lui aussi, un bon nombre d’amateurs sous la cravate. Dès l’ouverture, j’ai senti le sol s’ouvrir pour laisser pénétrer les souffles de l’enfer. C’était lourd, glauque et sinistre.
Chaque coup aux percussions se voulait un appel dirigé directement face à l’apocalypse. La voix de Mike Scheidt ballotte entre une complainte et un rugissement prophétique annonçant que le pire est à venir. Ça te foutait la pétoche! Avec des hymnes funèbres qui se veulent longs, le groupe a su nous anéantir totalement!
Lorsque la prestation de Yob s’est terminée, les lumières de la salle se sont ouvertes et un branle-bas de combat s’est opéré, question de vider la scène des instruments de Yob pour faire place à l’arsenal d’Enslaved. En guise de musique de fond, une trame sonore aux touches guerrières jouait, question de nous mettre dans l’esprit du combattant.
Enslaved a pris la scène sur la fin de cette trame sonore en y moulant la chanson Thurisaz Dreaming, la chanson qui ouvre leur dernier album, In Times. Avec la vigueur habituelle, le groupe a allié maitrise, intensité progressive et perfection métallique sur cette pièce pour laisser couler cette audace vers Ruun et Death in the Eyes of Dawn.
Avec ce choix de chansons, nous avons pu apprécier la voix docile du claviériste Herbrand Larsen. Son interprétation amène une belle dualité avec la musique du groupe. D’avoir ce type de musicien est un atout majeur pour le groupe.
« Tabarnak d’ostie de câlisse de sacrement! »
Une fois de plus, le chanteur et bassiste du groupe, Grutle Kjellson, nous a impressionnés avec sa grande maitrise du sacre de chez nous. La foule prend un malin plaisir, à chaque visite, de lui crier ce vocabulaire pour qu’à son tour, Grutle puisse y aller avec une façon excessivement convenable! Son accent québécois est près de la perfection.
Exécution précise, poigne ardue et une complexité teintée de métal noir planait dans les Foufounes lorsque le groupe a poursuivi avec Building with Fire, Ethica Odini et In Times. Même si la foule demeure fixe et immuable, ce n’est pas par manque de respect. C’est seulement que le groupe demeure hypnotique. L’analyse visuelle nous entraine à balayer la scène du regard tout en suivant la chamade en acquiesçant de la tête.
Pour qu’un véritable mouvement de foule surgisse, il faut attendre les pièces plus antiques du groupe avec Fenris et Isa, servies en rappel.
Il y a des tournées qui changent la carrière des groupes. Le cas le plus frappant demeure celui d’Amon Amarth qui ouvrait sur la tournée de Children of Bodom il y a de cela 9 ans. Par la suite, la popularité d’Amon Amarth a fait feu! Maintenant, Amon Amarth a son public a lui et le groupe demeure bien établi partout sur le globe.
Même chose avec Enslaved lorsqu’ils ont ouvert pour Opeth, comme je le disais plus haut. Enslaved possède maintenant son public à lui grâce à cette tournée mais surtout, grâce à des albums intéressants qui poussent musicalement sans se dénaturer… contrairement à Opeth! Là où les Suédois ont échoué, les Norvégiens ont capitalisé.
Vendredi soir, je me suis rendu compte qu’Enslaved a réussi là où Opeth a perdu des plumes. Enslaved reste un groupe inventif, progressif et métalliquement parfait! La confirmation demeure l’album In Times et le concert de vendredi.
Pour que le tout explose encore plus pour les Norvégiens, une série de concerts en ouverture de Mastodon serait à prévoir!
Photos de Kristof Gagné. Pour la suite des images, tu te rends sur son blogue, ICI!