Amnesia Rockfest 2016 : Retour sur le festival (Journée 2 / samedi 25 juin 2016)
Si certains s’attendaient à ce que je commence mon texte, du genre : « La levée du corps n’a pas été facile! Je ne peux pas croire que j’ai bu tout ça! » seront déçus. Non, loin de là. Malgré une « mise au pieu » vers 3h00 du matin, j’étais debout vers 9h00 du matin, frais et dispo. Oui, quelques abus ont été commis mais je sens que l’expérience prend le dessus.
Cette année, je me suis amené un sac Ziploc rempli de tartines au beurre d’arachide. Avec un contenant de jus aux agrumes, deux barres tendres et une banane, j’estime que ceci compte comme un déjeuner complet. Selon le guide alimentaire canadien, il ne me manquerait que le groupe des produits laitiers. Tiens, je me clancherai une poutine dans ma journée!
Tout de même, je dois avouer avoir eu des yeux envieux envers les voisins qui se faisaient des œufs et du bacon sur un charcoal de camping. Bande de chanceux…
Partie 2
samedi, 25 juin.
Une toilette vite faite, nous craquons les premières bières pour ensuite s’investir face à notre plan de la journée. Du moins, en ce qui concerne l’avant-midi car il est certain que nous allons en perdre quelques-uns en après-midi. Que ce soit pour une raison de fatigue, pour combler l’appétit ou par manque d’intérêt face au choix musical de la majorité, lors d’un festival, nous finissons toujours par scinder le groupe.
C’est mon choix qui a été retenu pour commencer la journée. Insurrection, qui est sur l’affiche à chaque année pratiquement, se retrouvait sur la scène Jägermeister dès 11h00. Énervés comme des enfants à noël, les musiciens ont attaqué la scène. Motivé, le chanteur Steph Barbu a su faire embarquer la foule en plus de se payer une session de body surfing qui me semblait plutôt confortable.
Généralement, les groupes « hommage » me laissent sur mon appétit, solidement. Nous ne relancerons pas ce débat. Certains aiment ce type de groupes, d’autres non. Si tu veux offrir un hommage à un groupe, tu dois faire un effort considérable face à ton interprétation et au visuel que tu comptes offrir. Dans cette catégorie, j’apprécie l’expérience lorsque le groupe propose une émulation plutôt qu’un hommage. Il est intéressant lorsque des musiciens prennent la peine d’utiliser des éléments de décor qui possèdent le même esthétisme. Quand l’effort est mis au niveau du choix des instruments qui rappellent ceux des musiciens originaux et quand le choix des vêtements se rapproche du groupe envers qui ton hommage est dirigé, j’embarque.
Celui de Pantera était réussi. À la guitare, tu avais l’impression d’avoir Dimebag étant donné que le jeu était similaire. Semblable, jusqu’à la gestuelle. Le filiforme bassiste Mat Paré doit avoir le même poids que Rex Brown et le Phil Anselmo montréalais avait la tête fraîchement rasée. Je peux comprendre que le batteur ne portait pas le même goatee ou le même bandana que Vinnie Paul mais ses coups semblaient avoir le même type de précision. En y allant avec des chansons comme Primal Concrete Sledge, Cowboys From Hell, Walk et Fucking Hostile, cet hommage s’est avéré excessivement efficace.
La question qui courait sur toutes les lèvres était la suivante : « Est-ce que l’hommage à GG Allin va pousser le tout à l’extrême? » Allin est reconnu pour ses frasques légendaires, sa nudité partielle (ou complète) sur scène, l’automutilation et l’expédition de… selles.
Monté par une bande de musiciens habiles, cet hommage à GG Allin proposait une version plus audible du matériel de cet icône du punk. C’était crasseux au niveau de la livraison sonore quoique le tout fût maîtrisé parfaitement par les musiciens. Lorsque l’émulateur d’Allin est arrivé sur scène, nous nous sommes regardés avec ce rictus de satisfaction. Avec son g-string, ses tatouages, le crâne rasé et la moustache tailladée avec une imprécision précise, l’illusion se voulait réussie.
Le microphone est devenu un instrument de mutilation, le sang s’est mis à couler du front créant l’approbation au niveau des participants. Le déhanchement, la fougue et l’agression combinaient une passion envers ce chanteur, me rappelant à quel point Kvarforth de Shining baigne dans les mêmes eaux car de voir des clips de Allin est une chose mais de pouvoir assister à un tel hommage est sidérant et m’a permis de créer ce rapprochement. Avec hargne, rage et férocité, ce groupe a livré l’une des performances les plus endiablées du Rockfest.
Non, je ne te parlerai pas de la baguette qui a été lancée…
L’Australie compte son lot d’animaux. Si le koala se veut mignon, le kangourou possède une réputation de cogneur. King Parrot est originaire d’Australie aussi. Aucunement mignon, ce groupe frappe plutôt comme le kangourou, justement. Le thrash/grind/sludge proposé en a déstabilisé plus d’un. En tournée avec Voïvod, il se peut que certains se soient attendus à un combo rock cosmique, étant donné leur présence sur les routes avec le groupe québécois. Hyperactifs et participatifs, les musiciens ont su laisser leur marque amplement!
Alex Erian jouait pour une deuxième journée de suite mais cette fois-ci avec son autre groupe, Obey the Brave. Beaucoup plus racoleur que Despised Icon, OTB a su faire embarquer la foule comme d’habitude grâce aux rythmiques extensibles, aux grooves aguichants et l’effet rassembleur des chansons.
Pour rester avec les copains, je me suis laissé embarquer par l’idée de rester pour Millencolin. Je ne possède qu’un seul album du groupe, que j’avais reçu alors que j’étais disquaire, et je me souvenais que je trouvais ce groupe très supportable. L’expérience s’est avérée gracieuse car j’ai eu bien du plaisir à voir et entendre le groupe. La foule était plus que participative, les paroles étaient chantées à tue-tête et les sauts des festivaliers s’effectuaient sans que Nicola Sarcevic n’ait à le demander.
Acacia Strain a un son lourd. Prodigieusement lourd. Des guitares à la Meshuggah mais avec des riffs poisseux, c’est magmatique comme facture sonore. La foule adore, elle remue selon les coups de picks qui donnent le feu vert aux percussions tandis que Vincent Bennett mène le bal, se laissant aller la main pour indiquer à quel moment il souhaite un mouvement collectif.
J’avais avisé les amis que nous devions nous rendre pour voir et entendre Korpiklaani. Avec une livraison sonore tempétueuse, les chansons du groupe ne donnent envie que d’une chose : faire la fête. En mettant le pied devant le groupe, nous nous sommes aperçus que c’était déjà dans la poche pour les Finlandais qui ont réussi à dévergonder la foule avec des chansons comme Vodka et Rauta.
Sepultura avait la lourde tâche, pour certains, de tenter de faire mieux que les Frères Cavalera la veille. Si les frères ont offert l’album Roots en entier, il était évident que Sepultura allait toucher au matériel de cet album. C’est avec Troops of Doom que le Sepultura du « nouvel âge » s’est offert au public. Accueil chaleureux, il n’y a pas eu de gestes disgracieux de la part de certains pro-Cavalera. La poigne d’Andreas Kisser est encore aussi puissante sur des titres comme Territory, Refuse/Resist ou sur des pièces plus récentes comme Kairos et Convicted in Life. Il est intéressant de voir à quel point évolue le jeune batteur Eloy Casagrande au sein du groupe, tout comme Derrick Green qui gagne en confiance, visite après visite.
Comparaison à faire? Non, même si Sepultura a joué Roots Bloody Roots, Attitude et Ratamahatta. Avec le temps, il faut juste se dire que c’est ainsi!
Le périple de Down semble être tombé dans le bayou de la Louisiane. Pepper Keenan est de retour avec Corrosion of Conformity. Après trois enregistrements en tant que trio, le quatuor se retrouve sur les routes, juste avant d’affronter le studio à nouveau pour la préparation d’un nouvel album. La formule avec Keenan amène une sonorité qui propose cette passion plus métallique, même bluesée lors de certains instants. De renouer avec des chansons comme Paranoid Opioid, Broken Man, Seven Days, Vote with a Bullet, Albatross et Clean My Wounds sous un soleil de plomb nous a rappelé à quel point ce groupe frappe de façon précise.
Anthrax demeure l’un de mes groupes fétiches. En mode festival ou en mode « ouverture pour un autre groupe », Anthrax propose souvent les mêmes chansons. Avec un nouvel album du nom de For All Kings, est-ce que la recette se retrouvera avec quelques nouveaux ingrédients, question d’avoir un nouveau goût en bouche? Lors de la dernière visite avec Motörhead, Anthrax avait plu mais avait servi la même recette habituelle. Cette fois-ci, les New-yorkais ont pigé généreusement dans le nouvel album en proposant au public pas moins de trois chansons récentes, dont Evil Twin et Breathing Lightning de For all Kings et Fight ‘Em ‘Till You Can’t de Worship Music qui se sont retrouvées avec deux valeurs sûres que sont Caught in a Mosh et Indians. Mais sérieusement, pour ce qui est de Got the Time et Antisocial, je prendrais une pause lors de la visite avec Slayer cet automne…
Quoi qu’il en soit, c’était efficace!
Il y a deux formations qui ont motivé ma présence au Rockfest en 2016 : Sodom et DRI. Le trio allemand n’avait pas mis les pieds au Québec depuis plus de 10 ans, ce qui semble une éternité dans un monde où l’on peut voir Destruction et Kreator (deux autres pionniers du thrash allemand) sur une période plutôt régulière. L’attente a valu la peine et le groupe était attendu par non seulement une bande de pionniers mais aussi par une panoplie de jeunes amateurs de thrash antique. De voir un drapeau du Québec à l’effigie de Sodom retenu par les mains moites de deux amateurs en première rangée a plu à Tom Angelripper, chanteur et bassiste du groupe.
Le matériel des années ’80, ’90 et les pièces plus récentes ont reçu un accueil favorable, la preuve étant la foule qui a terminé le refrain d’In War and Pieces. En faisant une alternance entre le matériel récent et les pièces classiques s’est voulu lucratif pour le groupe et surtout la foule qui a su s’emplir les tympans avec des titres comme Outbreak of Evil, M-16, le combo Surfin’ Bird du groupe The Trashmen qui se déverse dans The Saw is the Law, Agent Orange, Sacred Warpath et Blasphemer en finale. Le groupe avait prévu d’autres chansons comme Remember the Fallen, Proselitysm Real et Ausgebombt mais ont été coupées par manque de temps!
Lamb of God jouit d’une popularité indéniable. Avec un groove métal addictif, ce groupe peut pratiquement être considéré comme étant les nouveaux Pantera dans le sens qu’ils occupent ce créneau fortement enviable. C’est sous une vague chaleureuse d’applaudissements que le groupe s’est présenté sur scène sur Walk With Me in Hell. La poussière se levait vigoureusement pour retomber lentement. Ceux qui portent le t-shirt devant le visage ou le foulard de motocross avaient visé juste : c’est poussiéreux et suffocant à Montebello!
Après cette première chanson, l’irritant problème sonore est arrivé. Pendant une bonne dizaine de minutes, rien ne s’est produit sur la scène. Les musiciens ont quitté. Nous pouvions voir quelques techniciens passer, sans plu. J’aurais apprécié que le chanteur Randy Blythe puisse nous offrir quelques minutes de divertissement, en nous lisant un extrait de son livre par exemple. Ou bien, d’avoir Mike Ward livrer un extrait de son spectacle. Lorsque le problème a été réglé, nous avons ressenti une différence dans la balance sonore. Beaucoup plus de vibrations dans les basses, qui nous ont massé les mollets. Le groupe a donc terminé son concert avec des titres comme 512, Engage the Fear Machine, The Faded Line, Laid to Rest et Redneck.
Il semblerait que la prestation d’Ice Cube valait vraiment le déplacement. Ce type est une légende du rap et même, du cinéma. Il a joué dans Anaconda et Barbershop quand même, deux excellents films qui roulent encore régulièrement à CinéPop. Même si tu n’es pas un amateur de rap, le style qu’il préconisait avec NWA possédait cette attitude agressive qui se rapproche du métal et du punk rock. En surfant sur l’engouement du film Straight Outta Compton, Ice Cube a su capitaliser sur l’album du même nom.
De mon côté, j’étais à Voïvod. Côté choix déchirant, il n’en était pas question. Même si j’ai vu le groupe à plusieurs reprises et même si je risque de les revoir encore souvent, il était évident que les Québécois gagnaient la palme à mes yeux. La référence métallique québécoise n’a pas déçu et contrairement à d’autres formations de métal classique, Voïvod varie sa série de chansons offertes, tournée après tournée. Il est impensable qu’Astronomy Domine ne soit pas servie mais d’entendre The Prow m’a étonné. Rocky à la basse ne semble plus comme un étranger. Nous avons l’impression qu’il est avec le groupe depuis 10 ans. Lorsqu’il fait gronder sa basse sur des pièces plus récentes comme Post Society ou We Are Connected, nous comprenons qu’il était présent lors du processus créatif mais lorsqu’elle rugit sur Tribal Convictions ou Voïvod, c’est là que l’on comprend pourquoi le groupe lui a fait confiance.
L’attraction du samedi était Limp Bizkit, un groupe que tu aimes ou que tu détestes et ce, avec passion. La foule se voulait compacte pour la présence du groupe. L’alcool aidant, quelques personnes se bombaient le torse plus facilement et tentaient de se frayer un chemin. C’était plus baveux comme attitude, déplaisant même de la part de certains personnages qui ne doivent sortir que très rarement.
Je dois donner la couronne du King du Trollisme à Fred Durst. Il est passé maître dans le divertissement et il adore titiller la foule. Il a parlé, beaucoup, trop même pour certains qui auraient pris beaucoup plus de musique que de déblatération. En déclarant qu’Alex Martel offrait l’alcool gratuitement aux festivaliers, la foule n’a fait que hurler son approbation, personne ne voulait se déplacer pour perdre sa place devant le groupe.
En plus des discours de Durst, le DJ du groupe a laissé jouer Walk de Pantera, Party Up de DMX, Turn Down for What de DJ Snake pour laisser le temps à Durst de se promener dans la foule et Stayin’ Alive des Bee Gees, question d’étirer la sauce face à la montée sur scène de Bring Me the Horizon.
Quand je vous disais King du Trollisme…
Tout de même, le groupe a pu insérer les gros canons comme Nookie, My Way, Faith de George Michael, Rollin’ et My Generation.
L’évènement qui a valu le déplacement à Montebello était DRI. Après une absence d’environ vingt-ans au Canada, l’organisation du Rockfest s’est arrangée pour cuisiner le dossier et a réussi son pari. Pas seulement avec DRI mais aussi avec The Adicts. Nous étions dans le doute tout au long de la journée. Nous nous demandions si le groupe allait réussir à entrer au Canada.
Born of Osiris a dû déclarer forfait quelques jours avant. La peur nous guidait.
Mais lorsque j’ai aperçu le bassiste Harald Oimoen de DRI pendant le concert de Sodom, j’ai tout de suite compris que le concert allait avoir lieu.
C’était le show à voir en fin de semaine et le groupe n’a pas déçu, loin de là. Adroit, solide tout en dégageant de l’assurance, DRI a conquis le public avec des chansons comme Suit & Tie Guy, Thrashard, Acid Rain, Beneath the Wheel, Manifest Destiny, Abduction, Couch Slouch et The Five Year Plan.
Avec les problèmes face à leur entrée au Canada loin derrière, le groupe a annoncé qu’une tournée canadienne était dans les plans de DRI pour bientôt.
Après avoir zigzagué entre tous les corps étendus dans le gazon, à chercher à tâtons la poignée de porte de la roulotte et de gosser après la fermeture-éclair de mon sac de couchage pour pouvoir m’offrir un sommeil réparateur qui sera perturbé par le terrain voisin qui semble encore en mode festif, je me dis que cette aventure vaut encore la peine, même si ça me prend beaucoup plus de temps à m’en remettre que par le passé…
Encore une fois, toutes les photos sont de la dame aux cheveux bleus, Mihaela Petrescu!
Notre retour sur le JOUR 1 est ICI. Celui de Max Clark, juste LÀ et celui d’Olivier, c’est ICI!