Mon billet précédent dans lequel je proposais de saborder le PQ comme Pierre Bourgault l’avait fait pour le RIN a été pris au pied de la lettre, alors que je suggérais par mon outrance à brasser ce parti désorienté et enlisé depuis la défaite du référendum de 1995.
Brasser le PQ, qui en a bien besoin. Mais deux candidatures à la chefferie viennent justement secouer le confort des militants du parti et l’indifférence des citoyens québécois à l’égard du PQ lui-même.
Jean-François Lisée fut le premier candidat sérieux à dire clairement les choses: pas de référendum sur la souveraineté dans le prochain mandat. C’était la seule question qu’il fallait résoudre avant de se lancer et Lisée l’a compris. Il est irréaliste de penser pouvoir gagner un référendum sur la souveraineté du Québec dans l’état actuel des choses. Il faut, bien avant, reconstruire une fierté nationale, rappeler les revendications traditionnelles du Québec, celles qui traversent nos époques, par-delà les différentes formations politiques qui ont gouverné le Québec à travers son histoire. (Toute la démarche référendaire de 1995 est le produit d’une saga constitutionnelle…). C’est là que l’on découvrira comment ce sont les libéraux de Philippe Couillard (bien que le tout ait été amorcé sous Charest) qui créent une rupture avec le Québec et son histoire. Le gouvernement Couillard rapetisse le Québec et le fait entrer plus que jamais auparavant dans un provincialisme folklorisé, plus que jamais simple composante du multiculturalisme canadian. En démocrate responsable, Lisée a raison d’insister sur l’urgence de chasser les libéraux du pouvoir. À moins de détester le pouvoir ou de préférer le confort de l’opposition permanente, il apparaît impossible de battre les libéraux en 2018 avec au programme un référendum sur l’indépendance. (De toute façon, nous ne sommes pas prêts.)
Et voilà une deuxième candidature, celle-ci de l’extérieur, l’orphelin politique Paul St-Pierre Plamondon (après PKP voici PSt-PP), annoncera vendredi qu’il se lance lui aussi! Excellente nouvelle pour le PQ qui se fait brasser cette fois-ci de l’extérieur! Et mauvaise nouvelle pour M. Couillard! Car voilà une figure nouvelle et articulée (pas juste une coquille comme Mélanie Joly qu’il aurait côtoyé à Génération d’idées). Et le discours de PSt-PP est justement axé sur la préservation et le renforcement de la social-démocratie québécoise tant mise à mal par le gouvernement Couillard qui choisit la voie de la privatisation par étapes. Étape 1: destruction des CPE, asphyxie ou abolition des diverses instances intermédiaires de l’administration publique (CRE, CLD, régies régionales, instances régionales au sein des ministères); sous-financement.
Le PQ doit-il être le seul parti de l’indépendance? C’est ce que propose Martine Ouellet. JF Lisée et Paul St-Pierre Plamondon répondent différemment à cette question. Le PQ doit d’abord se présenter comme la principale alternative aux libéraux de Philippe Couillard en 2018. Sur le plan politique, je considère leur posture plus réaliste et plus porteuse. Et je me demande d’ailleurs qu’est-ce qui, au-delà des questions d’ego, peut empêcher chacun des camps ici en émergence, celui de Lisée et celui de St-Pierre Plamondon, de se rapprocher politiquement.
Mais stratégiquement, ne précipitons pas les choses, laissons les orphelins politiques envahir le PQ! Ça ne peut que lui faire du bien.
Je pense que Lisée se trompe (et nous trompe, à moins que sa mémoire soit défaillante). Il invoque le précédant de Parizeau pour justifier sa suggestion.
Mais Parizeau a bel et bien fait l’élection de 1989 en insistant que « un vote pour le PQ, c’est un vote pour la souveraineté ». Pour finalement gagner en 1994 et passer à un cheveu de gagner le référendum.
Ce n’est pas lui qui a mis de côté « temporairement » la souveraineté pour tenter de prendre le pouvoir, mais ses successeurs. Bouchard avec l’attente des « conditions gagnantes », Landry avec celle de « l’assurance morale de gagner », Marois avec « pas de référendum tant que les Québécois n’en demanderont pas un ».
Et l’on a vu ce que cette recherche du pouvoir a donné: Entre 1994 et 2014, le PQ n’a cessé de décliner, perdant un total de 677 322 voix. soit 38,2% de ses électeurs !!
Et pendant que le nombre d’électeurs bondissait de 1 118 975.
Ensuite, prétendre qu’il suffit de jouer sur « la fierté nationale » pour convaincre la masse des électeurs non intéressés par la souveraineté est illusoire. La souveraineté pour la souveraineté n’attirera pas les citoyens qu’il nous manque pour réaliser la souveraineté. Ils veulent savoir, concrètement, ce que cela va changer. Si on leur dit que ce n’est qu’un simple changement de drapeau et de signataires au bas des lois et des traités, va-t-on les convaincre que cela en vaut la peine ?
Que le pipeline d’Enbdrige (un exemple parmi des centaines) aurait pu être adopté par un Québec souverain au lieu de l’être par Ottawa avec l’appui inconditionnel de Marois qui a diabolisé les opposants au projet, comme cela s’est produit, ne changerait rien au fait que le pipeline aurait quand même été approuvé.
Un Québec souverain gouverné, à peu de choses près, comme le Québec province canadienne n’est pas un projet emballant. « Fierté nationale » ou non (surtout qu’on se demande de quoi on pourrait être fier).
La souveraineté doit redevenir ce qu’elle était jadis (avant Bouchard): Un projet de société emballant et mobilisateur.
C’est ce que propose Québec solidaire, et dans une moindre mesure Option nationale. Mais pour l’instant, ce n’est pas le message du PQ. Dont les dirigeants prétendent qu’il faut d’abord réaliser la souveraineté pour la souveraineté et qu’ensuite seulement « on » (pronom indéfini) décidera ce qu’on en fait.
Pour ce qui est de Paul Saint-Pierre Plamodon, je vous réfère vos deux collègues:
https://voir.ca/prolegomenes-anonymes/2016/06/02/paul-st-pierre-et-le-parti-quebecois/#comment-4
et
https://voir.ca/pierre-luc-brisson/2016/06/02/la-revolution-du-cynisme/#comment-227
(auxquels je me suis permis de laisser mes propres commentaires)