Pop Montréal : Famille éclatée
indie

Pop Montréal : Famille éclatée

Trois piliers du festival Pop Montréal – et de la musique alternative locale par la bande – abordent leur relation spéciale avec l’événement ainsi que leurs projets à venir au cours des prochaines semaines.

Aller trop loin avec Murray Lightburn

Leader du groupe culte montréalais The Dears, Murray Lightburn dévoilait il y a quelques jours Mass:Light, un projet solo qui servira de canevas à un opéra (présenté à Pop Montréal le 26 septembre, à la Fédération Ukrainienne) ainsi qu’à un film (sur lequel le chanteur planchera bientôt). «Il y a quelques années, il m’arrivait d’aller en studio et d’enregistrer les musiques qui me passaient par la tête. Il y avait du matériel là-dedans que je me voyais présenter au groupe, puis il y avait des chansons que je ne pouvais envisager comme des chansons des Dears.» D’où Mass:Light, un ovni plus électro que rock; une œuvre personnelle, bien sûr, mais plus ancrée dans la fantaisie, le terrorisme et la science-fiction. «C’est une comédie musicale abstracto-conceptuelle!» lance-t-il en rigolant.

Côté spectacle, Lightburn se fait discret en abordant la transition sur les planches de son nouveau projet. «J’en suis au point où moi-même, je me dis “Murray, t’es peut-être allé trop loin sur ce coup-là!”» lance-t-il en éclatant de rire de nouveau. Ainsi, selon le principal intéressé, Mass:Light, le happening, est à des années-lumière du show rock où, soir après soir, un chanteur et ses musiciens entonnent le même enchaînement de chansons, à une ou deux pièces près. «Si je devais vraiment le résumer, je dirais que c’est une rencontre entre le karaoké, le théâtre et peut-être bien un show de lumières!» laisse-t-il planer.

Kid Koala se transforme en Deltron 3030

Eric San et son alter ego poilu Kid Koala profitent d’une année 2013 particulière. Sa tournée Vinyl Vaudeville, accompagnant son album 12 bit Blues (2012), s’est poursuivie cette année et a vu San trimballer ses platines, marionnettes et danseuses (!) jusqu’en Europe. C’est d’ailleurs grâce à ce spectacle flamboyant que la drôle de bête s’est fait confier la tâche de remixer un tube de Beyoncé pour la trame sonore de The Great Gatsby à la demande du réalisateur Baz Luhrmann, visiblement épaté par le tour de piste auquel il a assisté à Los Angeles. En compagnie d’autres artisans du film, Kid Koala reviendra justement sur l’expérience lors d’une conférence présentée le 26 septembre aux Quartiers Pop (3450, rue Saint-Urbain) en plus d’échafauder un happening alliant musique, bouffe et vélos ainsi qu’un événement pour les tout-petits (le 29 en après-midi à la librairie Drawn & Quaterly).

Il y a quelques semaines, Kid Koala et ses compères Dan The Automator et Del The Funky Homosapien surprenaient la planète Web en annonçant finalement un deuxième album pour leur groupe rap futuriste Deltron 3030, suite logique qui paraîtra le 1er octobre sur Bulk Recordings, soit plus de 10 ans après leur première fournée. «Je crois que l’attente valait quand même la peine», se défend San afin de faire valoir que le trio n’a jamais perdu de vue son «super groupe». «On s’est rencontrés à plusieurs reprises au cours de ces 10 années, mais on avait toujours d’autres trucs qui nous occupaient.»

Non content d’enregistrer de nouvelles pièces, le trio revient dans les bacs avec une panoplie d’invités surprenants allant de l’acteur Joseph Gordon-Levitt à l’ex-Rage Against The Machine Zack de la Rocha. «C’est souvent très organique. C’est souvent des gens qu’on a rencontrés et avec lesquels on s’entend bien. Nous ne sommes pas vraiment “Mon agent va contacter ton agent!”» lance San, visiblement amusé. Pour la petite histoire, le lien entre Deltron 3030 et Gordon-Levitt s’est tissé sur le plateau de Looper, thriller auquel Koala a travaillé sur la trame sonore. «Bref, c’est un processus plus personnel que professionnel!»

La générosité selon Patrick Watson

Après avoir présenté le spectacle accompagnant son quatrième album, Adventures in Your Own Backyard, un peu partout à travers le monde, Patrick Watson profite de son retour au bercail pour s’associer avec l’OSQ (les 7 et 8 novembre au Grand Théâtre de Québec) ainsi que l’Orchestre Cinéma l’Amour (les 15, 16 et 17 novembre à l’Église Saint-Jean-Baptiste de Montréal). «On a déjà fait des shows avec orchestres un peu partout dans le monde. Je crois qu’on aurait pu choisir d’autres orchestres aussi, mais je voulais vraiment de jeunes musiciens qui voudraient vraiment le faire; qui seraient vraiment excités de contribuer à un projet comme ça», explique Watson en abordant l’Orchestre Cinéma l’Amour, une troupe formée sur mesure pour ce projet. En parlant d’aventures (dans sa cour arrière), l’énergique touche-à-tout se promet un véritable marathon de concerts et collaborations pendant Pop Montréal.

Ainsi, on apercevra le chanteur à la Fédération Ukrainienne le 25 septembre en compagnie de l’Ensemble d’Ondes de Montréal, un collectif maniant les ondes Martenot. Le lendemain, l’artiste enchaînera chansons et confidences à l’Olympia, là ou Jian Ghomeshi enregistrera un épisode de son émission de radio Q. Puis, le 27, Watson se joindra à une discussion du Pop Symposium sur la musique et les droits de propriété intellectuelle qui se tiendra aux Quartiers Pop et participera par la suite au trip 3D de Li’l Andy (voir encadré pour détails). Puis, le 29, l’interprète et pianiste livrera le clou de cette série: Songs Of Darkness, un événement présenté au chic Rialto, où il sera épaulé par AroarALittle ScreamSarah Pagé des Barr Brothers et plusieurs autres. «Montréal étant ma ville, je n’aime pas trop m’y répéter. C’est la ville qui m’a donné mon élan, alors je tente de lui garder des choses spéciales, de lui offrir des “cadeaux”. Ce ne sont pas des shows que je peux faire partout dans le monde. Ici, j’ai plein d’amis, alors on peut faire des choses qui sortent de l’ordinaire. Je trouve ça important».

Party de famille

Au fil des années, Watson a enchaîné les événements uniques présentés pendant Pop. Eric San, de son côté, y a révélé plusieurs facettes: son flanc électro, son penchant rock avec The Slew, son côté bon enfant en y allant de quelques chansons – toujours en tenue de koala – pendant la mi-temps d’une partie de basketball (on y reviendra). Murray Lightburn, lui, y a multiplié les emplois. En plus d’intervenir à titre de rockeur, il a également participé à la foire culturelle à titre de photographe. «J’en suis à croire que je fais partie de l’équipe de façon honoraire!» s’exclame Lightburn. «C’est la 12e année et j’y ai participé huit fois à titre de musicien ou encore de photographe et, les années que j’ai manquées, c’est parce que The Dears était en tournée à l’extérieur. C’est un beau joujou pour notre ville. C’est un festival très cool et je suis très fier d’y collaborer et très fier de ce que c’est devenu. À ses débuts, l’événement comptait sur une poignée de personnes et c’est maintenant une machine bien huilée et menée par une véritable équipe.»

Watson abonde dans le même sens. «C’est ma ville, man! C’est comme ma famille!» Plus tard, il mentionnera: «D’habitude, participer à un festival se limite à y arriver, y jouer, puis repartir. C’est un peu ennuyant. Des festivals comme Pop, pour lesquels on peut se permettre des activités spéciales, m’intéressent davantage que juste me pointer avec mon spectacle. Le répéter, over and over again, ce n’est pas très inspirant et c’est difficile d’en monter dans des endroits où on ne connaît pas tout ce petit monde.»

San fait aussi valoir l’ouverture d’esprit de l’événement, voire l’inconscience et la douce folie qui l’habite, selon le cas. «Ce matin, je parlais avec Dan (NDLR: Seligman, directeur artistique de Pop Montréal). Il m’a demandé si je voulais organiser d’autres trucs pendant le festival. Je lui ai parlé d’une tournée à vélo d’endroits de Montréal où je jouerais des pièces et raconterais des histoires à chaque arrêt en plus de manger des trucs et il n’a même pas sourcillé! Il m’a juste dit: “Ah! Je pensais plus à un concert dans une salle, mais cool, allons-y!”» se rappelle-t-il, complètement hilare, avant de conclure: «Ce festival m’a amené les plus belles histoires musicales de ma carrière! J’ai déjà participé à un show de mi-temps d’une partie de basketball en compagnie de Régine Chassagne et j’ai joué devant une foule monstre en première partie d’Arcade Fire lors de son concert gratuit à la place des Festivals. Cette année, je vais manger, jouer de la musique et faire du vélo! C’est quand même fou, non?»

À lire aussi:

Artistes à surveiller à Pop Montréal