Pré-dévoilement de la programmation 2014 : La crème du théâtre français et de la danse québécoise au FTA
Scène

Pré-dévoilement de la programmation 2014 : La crème du théâtre français et de la danse québécoise au FTA

Le Festival TransAmériques, dirigé pour la toute dernière année par sa fondatrice Marie-Hélène Falcon, dévoilait aujourd’hui 7 spectacles de sa programmation 2014. Le jeune metteur en scène français Julien Gosselin, véritable buzz au plus récent festival d’Avignon, est du nombre avec sa géniale relecture des Particules élémentaires, de Michel Houellebecq.

Nous n’aurons pas tout de suite de réponse à la question qui brûle toutes les lèvres : qui sera le successeur de Marie-Hélène Falcon à la direction artistique du FTA? «Vous le saurez très bientôt», s’est contenté de dire la principale intéressée. D’ici là, on continuera de savourer ses choix de programmation: les sept spectacles dévoilés aujourd’hui sont de haut calibre.

La France en ébullition

Chaque année, le festival d’Avignon attend frénétiquement son jeune sauveur : un metteur en scène quasi-inconnu qui débarque avec une proposition atypique, qui casse la baraque et que l’on s’empresse de porter aux nues. L’été dernier, c’était Julien Gosselin, 26 ans, et les remarquables acteurs de sa compagnie Si vous pouviez lécher mon cœur. Au tour de Montréal de vivre l’expérience mi-théâtre mi-concert de ses Particules élémentaires, un spectacle rythmé qui donne à la temporalité fracturée du roman de Michel Houellebecq une très efficace incarnation scénique. Quand nous l’avons vu en France, nous soulignions la «très belle esthétique qui met à profit la musique, la vidéo, le surtitrage et les voix amplifiées pour créer un très efficace dispositif de narration dans lequel se déploie avec cohérence un dialogue fertile entre la voix du narrateur et celles de ses personnages.» Marie-Hélène Falcon, elle, en parle comme d’un spectacle éloquent qui décrypte à merveille les «contradictions de la société occidentale et qui évoque la possibilité d’une post-humanité dans une esthétique rock et fluide». Elle ajoute que Julien Gosselin a du «culot». On est d’accord.

Autres jeunes génies du théâtre français, Antoine Defoort et Halory Goerger (L’amicale de production) amènent au FTA l’hilarant Germinal, une pièce qui réinvente le monde avec une console d’éclairage et beaucoup d’intelligence, mais surtout avec un humour décalé et déconcertant. «La pièce, explique Marie-Hélène Falcon, s’intéresse à l’apparition du langage et son évolution, avant de se livrer à une organisation empirique du monde et une classification de l’humanité selon des paramètres nouveaux et rigolos.» À ne rater sous aucun prétexte (c’est nous qui soulignons).

La France est aussi mise de l’avant dans la programmation danse avec le plus récent spectacle de Christian Rizzo, D’après une histoire vraie, qui puise dans les danses traditionnelles et ancestrales de la Méditerrannée pour créer une danse exaltée qui, aux dires de Marie-Hélène Falcon, «rappelle à l’humanité son désir de danser ensemble». Quand nous l’avons vu en juillet, nous écrivions que «le langage chorégraphique très précis évoque superbement notre penchant naturel vers le regroupement et notre besoin inné de vibrer à l’unisson» et que «sans sensiblerie, dans une bonne humeur toute naturelle, les danseurs semblent insensibles à l’individualisme ambiant.»

Danser québécois parce que le talent y est

La danse contemporaine montréalaise traverse une période faste et ses représentants les plus illustres ne semblent pas encore s’essouffler. Le FTA nous permettra de le constater à nouveau en mettant en lumière le récent travail de Benoît Lachambre, Daniel Léveillé et Paul-André Fortier. Deux des trois spectacles sont exceptionnellement des reprises (le FTA n’en a pas l’habitude), mais «le jeu en vaut la chandelle», précise la directrice artistique.

Dans Snakeskins, Benoît Lachambre propose une danse «vertigineuse, mystérieuse et spirituelle », aux dires de Marie-Hélène Falcon. «Ce spectacle est né de la nécessité de reconnaître en moi les traces laissées par mes ancêtres des Premières Nations » a expliqué Lachambre. «J’ai exploré comment l’héritage autochtone a marqué mon subconscient et mon monde onirique. C’est un peu un acte de guérison, mais c’est aussi un acte de reconnaissance envers une culture fondamentale dans mon identité et dans celle de tous les Québécois, même si l’histoire nous l’a trop souvent cachée.» À la collègue Fabienne Cabado en 2012, il disait aussi travailler «une ondulation de la colonne vertébrale qui permet un relâchement » et «jouer avec l’énergie, travailler avec les fluides, avec les perceptions».

En rappel, les festivaliers pourront aussi voir Solitudes solo, de Daniel Léveillé, qui devait être créé au FTA 2012 mais qui l’a finalement été plus tard en raison des blessures des danseurs. Avec ce spectacle, Léveillé fait un virage en travaillant le solo et en vêtissant les corps des danseurs de sous-vêtements colorés. «Mon instinct me disait que je devais aller voir ailleurs», a-t-il expliqué, soulignant aussi à quel point la partition de ce spectacle est exigeante pour ses danseurs. À lire aussi: notre entretien avec le chorégraphe en septembre 2012.

Sera également présentée la nouvelle creation d’un chorégraphe québécois de renom, Paul-André Fortier, qui explore dans Misfit blues un monde de contrastes, de la clarté à l’obscurité, de l’ascétique au déjanté, de l’amer au sucré. Il collabore pour la première fois avec la Saskatchewanaise Robin Poitras et le plasticien autochtone Edward Poitras.

 

Saga historique sous l’eau et la neige

La troisième partie de la trilogie L’histoire révélée du Canada Français 1608-1998, du Nouveau Théâtre Expérimental, s’intitulera Le pain et le vin et sera présentée en première mondiale au FTA. Mais c’est à une aventure théâtrale épique que nous convie le festival en proposant l’intégrale de la saga dans un spectacle d’une durée de 7 heures (dont les deux premiers volets ont été vus au cours des deux dernières saisons à l’Espace Libre). Alexis Martin, auteur et metteur en scène de cette épopée historique (avec Daniel Brière), en parle comme d’une «tentative candide de remettre l’histoire au premier plan» et de «contrer la nonchalance avec laquelle nous envisageons notre histoire» tout en combattant «l’hypermnésie collective». Vaste programme. À lire pour en savoir plus, nos critiques de L’invention du chauffage central en Nouvelle-France et Les chemins qui marchent.

Notez que le reste de la programmation sera dévoilé le 24 mars 2014.

Ces 7 spectacles sont déjà en vente à la billetterie de la Place des Arts et à La Vitrine. Un forfait de trois spectacles pour 100$ est déjà offert (il n’inclut pas la saga du Nouveau Théâtre Expérimental).

http://www.fta.qc.ca/