Rap local : Mike Shabb, éclaircir l'obscurité
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Rap local : Mike Shabb, éclaircir l’obscurité

Chaque semaine, cette chronique met en lumière l’oeuvre des rappeurs et des producteurs québécois les plus intéressants du moment. Au programme : entrevue, bons coups de la semaine et aperçu des prochains spectacles à voir.

Entrevue //

Une fois de plus épaulé par VNCE Carter (de Dead Obies), le rappeur et producteur montréalais Mike Shabb présente GLOOM, un EP

VOIR : La dernière fois que nous nous sommes parlé, c’était à l’hiver 2018 dans le cadre d’une table ronde réunissant des rappeurs clés de la relève d’ici. Dans les mois qui ont suivi, tu as sorti un album, Northwave, et un EP, Newave. Es-tu satisfait de l’accueil que tu as reçu?

Mike Shabb : I guess, ouais. Ça a commencé late, mais ça s’est bien terminé avec Newave et, surtout, le single Big Bag, qui a eu des centaines de milliers de stream. Depuis, j’ai l’impression que j’ai pu développer mon art à 100%. J’ai investi dans un studio chez moi, et ça m’a permis de faire de la musique plus librement. Au lieu d’écrire et de me préparer pour aller dans un studio extérieur, je fais du freestyle, en enregistrant mes chansons ligne par ligne et en prenant le temps que je veux pour faire le mixing.

Ton nouvel EP GLOOM a été en partie enregistré à Los Angeles. Pourquoi avoir été là-bas?

Je voulais enregistrer quelque chose de plus catchy et mélodieux, m’éloigner de mon style de chanson hard avec des grosses basses et ma voix rauque. Je devais remettre mon EP en mars, mais finalement, j’ai push back le truc, car j’avais l’opportunité d’aller à L.A. à ce moment-là et je savais que j’allais pouvoir catcher une vibe spéciale là-bas. Sur place, je suis allé voir mon boy Nate Husser et mes amis Sadjo Ka et Daouda Ka, deux models de Montréal qui ont déménagé là-bas. Ils m’ont amené à West Hollywood, là où j’ai filmé le clip d’All Black. À mon avis, c’était la touche qui manquait au EP, soit quelque chose de plus ensoleillé et accessible.

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Qu’est-ce qui a motivé ce changement de style? Disons qu’on est loin de l’approche rugueuse de Northwave

J’ai compris que, quand tu fais de la musique, tu dois pas la faire juste pour toi, mais aussi pour les autres.  Et, je le cacherai pas, ma vie en général s’est éclaircie dernièrement. Je suis plus mature, plus aisé financièrement, j’ai moins de bullshit going on… Je suis plus content et je ressens moins le besoin de me prouver en étant full arrogant. En même temps, le titre du EP, GLOOM («obscurité» en français), montre que tout est pas parfait non plus. Je me sens souvent dans un gloomy state of mind, dans un genre de brouillard. Bref, c’est pas toujours beau, mais maintenant, je m’arrange pour voir davantage les bons côtés. Je vois la balance entre le jour et la nuit, le soleil et la lune.

Tu renoues avec VNCE Carter à la coréalisation de ce projet. C’est lui qui t’a pris sous son aile il y a deux ans en te signant sous Make It Rain Records, branche de Bonsound dont il assure la direction artistique. Comment votre relation a-t-elle évolué au fil du temps? 

C’est encore mieux qu’avant, car on a développé une amitié à travers tout ça. C’est pu juste le A&R de Make It Rain ou celui qui m’a drafté, c’est vraiment un ami avec lequel je fais toujours de la musique. Sa manière de mixer et de faire des beats est vraiment incroyable, et je peux dire qu’il a contribué à mon changement de style. Je m’enlignais vers ça anyway, mais il m’a motivé et appris plein de choses.

YBN Cordae et Mike Shabb – Le National (Montréal), 28 juin (19h)

SAiNTRAPEZ IV 2019 avec Mike Shabb, Kevin Na$h, bill noir et Lord Gasp – Local 41 (Sainte-Thérèse), 6 juillet (21h)

La nouvelle de la semaine //

Les Francos de Montréal dévoilaient leur programmation extérieure la semaine dernière et, encore une fois, on peut parler d’une très bonne cuvée pour le rap local. Du 14 au 22 juin, on pourra notamment y voir KNLO, Eman, Rowjay, Salimo, Yvon Krevé, O.G.B, Ruffneck (et tout l’équipage de l’étiquette BBT), Benny Adam, MCM & Psycadelick, Dramatik, Marie-Gold, D-Track, Obia le chef et Fwonte. Trois artistes auront la chance de fouler les planchers de la plus grande scène de la Place des Festivals : FouKi (15 juin), Sans Pression (17 juin) et Koriass (22 juin).

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Le projet de la semaine //

Honorable mention au surprenant Gloom de Mike Shabb, mais la palme de cette semaine va (sans surprise) à Loud. Sur son deuxième album solo, le rappeur natif du quartier Ahuntsic à Montréal laisse de côté les histoires de son adolescence et nous fait le bilan de ses derniers mois très chargés, essentiellement marqués par sa fulgurante ascension sur la scène musicale québécoise et française. Si certains de ses textes se ressemblent un peu trop dans leurs thématiques et leurs messages, Loud impressionne encore une fois avec ses figures de style raffinées et son flow posé, autant capable de mordant (Pas sortable) que de douceur (Sometimes, All The Time). En partie calqué sur le modèle de son prédécesseur, Tout ça pour ça demeure une suite prudente, mais digne.

La chanson de la semaine //

Parue au début du mois sur son mini-album Rouge, cette percutante chanson de Pazoh en collaboration avec Le Réel Fléau a marqué la semaine en raison de la sortie de son vidéoclip le 21 mai dernier. Grâce à sa basse cinglante, son habillage minimaliste et le flow posé de ses deux auteurs, Peu importe s’avère mémorable.

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Mention aussi au retour de Steve Beezy, à son meilleur sur 3.5, premier extrait du quatrième chapitre de La Réforme, à venir le mois prochain.

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L’instru de la semaine //

C’est DJ Manifest qui rafle les honneurs cette semaine, non pas pour une instru en particulier, mais bien pour l’ensemble de son admirable beat tape Musa, Vol. 3. Défricheur aguerri d’échantillons funk, soul et R&B américains, le producteur s’amuse comme jamais sur ce troisième projet instrumental d’une série amorcée il y a déjà sept ans.

Soulignons au passage le groove rondement travaillé d’un autre brillant producteur d’ici : Patrick Wade alias Dead Horse Beats. Paru sous Bastard Jazz, son nouvel album Inglaterra tangue davantage vers le R&B que le hip-hop à saveur jazzy qui caractérisait ses premiers projets.

Le clip de la semaine //

William Fradette signe une touchante et magnifique réalisation pour Sometimes, All The Time, conversation intime entre Loud et Charlotte Cardin.

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Dans un style fort différent, beaucoup plus saugrenu, le réalisateur Tyler Reekie s’aventure dans le Montréal nocturne et propose une mise en scène post-Internet inspirée pour Social Meds, intéressante chanson qui met la table pour le premier album de la Montréalaise Hua Li 化力.

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Les spectacles à voir //

Ghostnaut & Friends – Special Guest L’indécis

En vedette dans cette même chronique la semaine dernière, le producteur montréalais Ghostnaut dévoilera son hip-hop léger teinté de soul, de funk et de jazz lors d’un spectacle spécial, qui mettra notamment en vedette L’indécis, beatmaker de Grenoble.

Le Ritz PDB (Montréal), 31 mai (19h30)

Osheaga et Joy Ride Records présentent Loud

Le moment crucial est enfin arrivé : Loud sera le premier rappeur québécois à être la tête d’affiche d’un spectacle au Centre Bell. La première date affiche complet, mais il reste des billets pour la supplémentaire du 1er juin.

Centre Bell (Montréal), 31 mai et 1er juin (21h)

Lancement EDEN power corp

Les producteurs Lunice, Tommy Kruise et Ourielle se réuniront pour le lancement d’EDEN power corp, le nouveau projet du designer de mode Isaac Larose.

Datcha (Montréal), 1er juin (23h)

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