Des clics et des claques

Quand le web va trop vite

J’ai eu l’impression, la semaine dernière, que l’Agenda setting traditionnellement fluide et cohérent du webqc avait complètement explosé.

J’ai appris bien peu de choses à l’université en journalisme. On nous a averti, mais pas suffisamment à mon avis, à quel point notre profession choisie était maudite. On nous a aussi appris l’importance d’un lead, ce premier paragraphe qui dévoile toutes les informations pertinentes dans un article informatif (ce que cette chronique n’est pas, d’où l’absence justifiée de lead). Et on nous a parlé de l’Agenda setting, cette théorie de la communication selon laquelle les puissances économiques, politiques et médiatiques se battent pour établir le mot d’ordre dans les médias et, conséquemment, dans l’esprit des gens.

J’ai tendance à suivre de nombreuses personnes sur les réseaux sociaux: certains amis vont systématiquement partager les articles de chroniqueurs d’Urbania, d’autres vont partager les vidéos de webstars, d’autres vont maintenir le cap constant de leur autopromotion éhontée (je crois, tristement, que je fais partie du troisième groupe, LOL).  Je ne sais pas si c’est parce que j’ai mille amis Facebook (versus la moyenne de 300 et quelques, je crois) et que je suis autant d’individus sur Twitter, mais j’ai eu l’impression, la semaine dernière, que l’Agenda setting traditionnellement fluide et cohérent du webqc avait complètement explosé.

La Charte, bien sûr, a monopolisé l’attention, mais d’une bien étrange manière: mis à part le Manifeste pour un Québec inclusif (que vous pouvez signer), la liste de liens apparaissant sur mon fil d’actualité [youtube href= »http://www.youtube.com/watch?v=hGSLQ9eDJZM »]était[/youtube] [youtube href= »http://www.youtube.com/watch?v=bUbtfVEfNfo »]presque[/youtube] infinie, amenant vers une diversité de sources qui avaient toutes quelque chose de très pertinent à dire à son sujet, autant pour défendre l’initiative de Drainville (cette position était moins présente sur mon fil d’actualité) que pour la pourfendre.

La Charte a révélé à quel point Internet est un monstre insatiable qui n’attend plus personne pour se mettre en branle: malgré un article fort intéressant du Détesteur, toute l’importance accordée à Arcade Fire lundi dernier s’est dissipée le lendemain au dévoilement de la Charte. Le [youtube href= »http://www.youtube.com/watch?v=ab9176Srb5Y »]nouveau clip d’Eminem[/youtube] a à peine survécu la journée, et Miley Cyrus, qui [youtube href= »http://www.youtube.com/watch?v=My2FRPA3Gf8″]dévoilait un clip[/youtube] elle aussi, se faisait à peine ressentir quelques jours après le dévoilement. À eux seuls, dans un webqc plus neutre, ces artistes auraient dominé les clics et les partages quelques heures de plus. Mais la culture du meme et du remix s’était concentrée sur la Charte.

Et le lendemain de la Charte, c’était le 11 septembre, une date idéale pour parler d’Agenda setting: tandis que certains se rappelleront les attentats de New York, d’autres vous rappelleront le coup monté de la CIA contre Allende au Chili. À savoir si on parlait du 11 septembre chilien avant que l’Américain n’ait eu lieu, je ne sais pas, mais une chose est certaine: on vous rappellera constamment que vos priorités sont les mauvaises.

Tandis que les employés de NRJ étaient sommés (je l’imagine, je ne confirme rien) à révéler qu’Éric Lapointe était le quatrième juge à La Voix, Kim Lizotte nous rappelait que malgré Lapointe et la Charte, il y avait la Syrie que les Américains allaient bombarder sous peu. Au moment d’écrire cette chronique, les Américains ralentissaient leurs initiatives guerrières sous condition que Bachar Al-Assad remette ses armes chimiques à la communauté internationale, question que la Syrie puisse continuer à s’entre-tuer avec des armes traditionnelles.

C’est probablement de ma faute si mon fil de nouvelles virtuel est si diversifié, éclectique et chaotique. Je peux bien supprimer des contacts moins intéressants (comme le conteste l’observatrice bien pertinente Gendreau), mais la semaine dernière, il me semblait inévitable d’être confronté à une multiplicité de priorités médiatiques.

À un tel point que deux clips de Laurence Baz Morais, ce réalisateur de vidéoclips de ton Internet, sont quasiment passés inaperçus, malgré le timing ironiquement incroyable d’un de ceux-ci.

[youtube]Hs2WL2ZW5j4[/youtube]

C’était une grande semaine pour le cynisme.