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Les conditions pour une insurrection

Le 26 mai 2013, j’ai publié le premier de quatre textes pour réfléchir en public sur mon engagement dans la politique active. Le premier texte était intitulé « L’ennemi intérieur », j’y décrivais le mal qui nous afflige en ce moment à Montréal, au Québec, au Canada et partout ailleurs.

Puis j’ai publié le 2e texte : « Comment reconnaître l’ennemi intérieur » où je décrivais les symptômes et indices à observer pour comprendre qui est cet ennemi.

Cette semaine, le 3e texte : « Les conditions pour une insurrection » dont j’ai fait une lecture publique de protestation devant les bureaux de Jean-François Lisée à Rosemont et d’Hydro-Québec au centre-ville.

Très bientôt, la conclusion avec le 4e texte : « Passer à l’action »

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Les conditions pour une insurrection

La situation au Québec n’est pas aussi grave que celle de la Grèce ou même de la France, mais il en demeure que depuis l’arrivée au pouvoir de Lucien Bouchard, tous les premiers ministres et la première ministre ont suivi le même chemin par leurs actions ou par leurs omissions : ils ont progressivement affaibli le Québec, nous rendant vulnérables aux mêmes vautours qui ont pillé les petits épargnants américains, qui ont commis un coup d’État économique en Grèce et qui travaillent partout dans le monde pour s’approprier le bien commun et asservir les citoyens.

Depuis plus d’un an j’ai partagé sur ce blogue mes préoccupations sur :

J’apprends à la lecture de ce texte : Libre-échange – Des contrats d’Hydro-Québec aux Européens? que « Le Québec s’apprêterait à permettre aux entreprises européennes à soumissionner pour une partie des contrats d’Hydro-Québec… » C’est donc dire que Pierre-Marc Johnson, le négociateur en chef pour le Québec dans les négociations sur l’Accord économique commercial Global Canada-Europe (AÉCG) a failli à sa tâche de défendre les intérêts du Québec dans ce dossier. M. Johnson doit être congédié immédiatement et Pauline Marois, première ministre, et Jean-François Lisée, ministre des Relations internationales, doivent intervenir au plus haut niveau pour empêcher pareille concession de la souveraineté politique de la province du Québec.

Si les marchés publics d’Hydro-Québec, et d’autres paliers de gouvernement devaient être inclus dans cet accord, ce ne serait rien de moins qu’une attaque en règle contre l’intégrité territoriale, économique et politique du Québec.

 

Jusqu’où suis-je prêt à aller pour défendre le Québec ?

 

Pour répondre à cette question, il faut poser une autre question plus simple : jusqu’où suis-je prêt à aller pour me défendre ?

 

C’est certain que si quelqu’un m’attaque, ou attaque quelqu’un près de moi, je vais réagir et riposter à la mesure de l’attaque. Ça ne m’est jamais arrivé, mais pour avoir vécu des situations semblables, je pense que mes réflexes d’autodéfense ne seraient pas loin. Quand j’ai fait une chute en vélo l’an passé, j’ai roulé comme en judo pour amortir la chute, même si ça faisait plus de 30 ans que j’avais pratiqué ce sport. Il me reste encore des réflexes de survie.

Quels réflexes nous restent-ils collectivement si l’on nous attaque ? À voir le déferlement de casseroles dans les rues de Montréal en mai 2012 après l’annonce de la loi 78/12, je pense que certains réflexes sont bons, mais nous sommes encore un peu lents à réagir quand les attaques sont vicieuses et cachées. Ceux qui travaillent contre le Québec le savent. Ils appliquent suavement la doctrine de Machiavel, que Denys Arcand a mise dans la bouche de Jean-Pierre Ronfard dans « Le Confort et l’indifférence » . Le texte original énonce :

« Qui veut changer la constitution d’un état libre de manière que ce changement soit accepté et qu’il puisse se soutenir avec l’agrément de tous doit nécessairement retenir quelques vestiges des anciennes formes afin que le peuple s’aperçoive à peine du changement quoique la nouvelle constitution soit fort étrangère à la première, car l’universalité des hommes se repaît de l’apparence comme de la réalité souvent même l’apparence les frappe et les satisfait plus que la réalité même. »

– Nicolas Machiavel, Discours sur Tite-Live, chapitre XXV

Bref, on ne détruit pas un pays d’un seul coup, on le fait par petites actions progressives, enlevant morceaux par morceaux la liberté, la prospérité, l’autonomie afin que les citoyens s’adaptent lentement à leur nouvelle situation sans se rendre compte qu’ils sont en train de perdre tout, glissant inexorablement vers l’état d’esclaves abrutis par la consommation et l’illusion de la sécurité.

Ce qui m’amène à la question qui me préoccupe depuis plus de deux ans :

Quelles sont les conditions au Québec qui rendent l’insurrection urgente, nécessaire, possible et justifiée?

À quel moment allons-nous constater que nous sommes en danger collectivement et nous rendre compte que nous devons nous insurger pour reprendre le pouvoir de ceux qui le détiennent et en abusent?

Quand nous aurons perdu notre souveraineté sur l’eau potable? Avec les projets de fracturation hydraulique, les pipelines de pétrole bitumineux et l’usage insensé des pesticides, nous devons être vigilant et implacable.

Quand nous n’aurons plus confiance dans les partis politiques parce que leur partisanerie et leur corruption auront gangréné les plus hautes sphères de l’État? Avec l’arrestation du maire par intérim Michael Applebaum dans le giron des révélations de la Commission Charbonneau, il y a de quoi mettre la Ville de Montréal en tutelle.

Quand nous aurons perdu notre souveraineté alimentaire? Avec les OGM qui contamine les récoltes, les pesticides qui tuent les abeilles, la mondialisation qui nous fait exporter et importer des volumes imposant de nourriture et les criminels qui spéculent sur les denrées alimentaires dans les marchés boursiers on comprend pourquoi les citoyens se lancent dans le jardinage urbain.

Bien qu’il y ait beaucoup de pauvreté, la majorité des citoyens n’est pas menacée de famine.

Bien que la situation économique soit préoccupante, le taux de chômage est encore bas comparativement aux autres pays.

Bien que nous vivions dans un État qui utilise régulièrement la violence policière contre ses citoyens, nous vivons dans un pays relativement libre.

Bien qu’il y ait un certain niveau de criminalité inhérent aux grandes société modernes, nous vivons quotidiennement dans une relative sécurité.

Bref, ça ne va pas si mal, pourriez-vous vous dire…

Relisez donc la phrase de Machiavel, puis relisez mon texte sur l’ennemi intérieur publié le 26 mai dernier – https://voir.ca/denis-mccready/2013/05/26/lennemi-interieur/

Ensuite, relisez l’article de TVA sur les contrats d’Hydro-Québec.

Que ce soit par la volonté de certains ou l’incompétence des autres, on est en train de piller et détruire le Québec à petit feu.

Les cures de désintoxication du corps sont à la mode, mais c’est notre cerveau qu’il faut désintoxiquer en premier, pour remettre en fonction notre capacité de percevoir la violence de l’État et des compagnies privées contre nous. On nous tue au ralenti et ça n’arrêtera pas tant qu’on ne s’y opposera pas. Il ne faut pas attendre d’aboutir à une situation misérable pour agir et changer le cours des choses. Il faut agir maintenant.

Ça ne va pas bien au Québec. C’est pire ailleurs, mais c’est ce coin de pays qui me préoccupe. J’habite ici et j’ai l’intention d’y rester. Le temps est venu d’aller plus loin que les mots.

La semaine prochaine, mon dernier texte de cette série : Passer à l’action