Rap local : Obia le chef, démystifier le personnage
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Rap local : Obia le chef, démystifier le personnage

Chaque semaine, cette chronique met en lumière l’oeuvre des rappeurs et des producteurs québécois les plus intéressants du moment. Au programme : entrevue, bons coups de la semaine et aperçu des prochains spectacles à voir.

Entrevue //

Un an et demi après Soufflette, album qui s’est retrouvé au sommet de notre palmarès des projets de l’année 2018, le rappeur montréalais Obia le chef explore différentes avenues sur Zoklo, un EP produit par DoomX, VNCE Carter, Major et High Klassified.

Zoklo commence assez fort avec Navette, pièce sur laquelle tu te dévoiles comme jamais. Qu’est-ce qui t’a poussé à écrire quelque chose d’aussi intime?

Au fait, c’est de ta faute! Dans ta critique de Soufflette, tu disais que je gagnerais à creuser davantage mon passé et, entre temps, y’a mon ami Benny Adam qui m’a un peu dit la même chose. C’est le genre de critique que je prends bien. Et, dernièrement, ce qui m’a donné confiance à m’ouvrir davantage, c’est l’album Jeannine de Lomepal. J’ai vu qu’il était capable de se confier habilement, sans que ça perde de sa pertinence. Dans Soufflette, y’avait rien d’hyper personnel, c’est vrai, mais là, c’est venu naturellement. J’ai écrit la chanson en quatre heures au studio très tard dans la nuit. 

As-tu trouvé l’exercice libérateur?

C’était plutôt épeurant, je dirais. Dans la vie, j’ai toujours été sur mes gardes, et les gens me perçoivent souvent comme quelqu’un de froid, de distant, de difficile d’approche. C’est un peu ça que je voulais démystifier. Je l’ai pas fait pour les gens, mais je suis content de l’impact que la chanson a jusqu’à maintenant. Mon but n’est pas de faire uniquement des chansons comme ça, mais la réaction de ceux qui l’ont entendue me rassure. 

Crois-tu que c’est ton passé dans l’univers du battle rap qui t’empêchait de t’ouvrir auparavant? 

Pour vrai, à l’époque où je faisais du battle rap, jamais j’aurais pu faire une toune comme ça. J’ai fait un peu de storytelling sur Le Théorème et Paranoïa (vol. 1), mais sans plus. Fallait pas que je donne des munitions à mes adversaires! Soufflette aussi, c’était un album victorieux, mais là, j’avais envie de faire autre chose. Les gens peuvent maintenant savoir vraiment qui je suis et j’en ai rien à foutre.

Au-delà de cette ouverture mémorable, j’ai l’impression que cet EP est une belle plateforme d’exploration pour toi. Quelle était ton intention?

Je voulais explorer, mais sans m’éparpiller. Surtout, j’avais l’impression que je devais monter la barre au niveau du flow. Et je crois que cette exploration-là a été bénéfique, car je n’ai jamais enregistré une chanson aussi intense que Blé doublé, par exemple. En voyant l’énergie des shows durant la tournée que j’ai faite avec Dead Obies, j’ai constaté qu’il manquait un peu d’intensité à ma musique. Sur Soufflette, y’avait rien de vraiment hargneux, à part Queuleuleu peut-être. Je voulais répondre de manière plus agressive à tout ça avec plus de prods qui déchirent et plus de basses fréquences.

Il y a deux collaborations sur cet EP : une avec FouKi et l’autre avec Tizzo. Ce sont deux des plus populaires rappeurs à l’heure actuelle, mais leurs publics sont foncièrement différents. L’idée était-elle de faire le pont entre deux scènes?

Mon intention était pas nécessairement de faire le pont entre le rap gentil et le street rap, mais juste le fait d’avoir réuni ces gars-là sur mon EP, ça finit par faire une sorte de statement. La réalité, c’est que ce sont deux personnes qui sont dans mon cercle immédiat. Y’avait pas vraiment d’autres rappeurs aussi près de moi durant la création du projet.

En spectacle : le 20 septembre au Village urbain Desjardins (Laval) dans le cadre de LVL UP et le 21 septembre à la Source de la Martinière (Québec)


La nouvelle de la semaine //

Rymz confirme qu’il y aura une suite à Amsterdam, album collaboratif avec Souldia paru il y a un peu plus de trois ans. Dans une capsule publiée sur la page Facebook de iHeartradio, le rappeur montréalais nous signale qu’il «manigance» un projet avec le rappeur de Québec. Pas de détails à propos de la date de sortie exacte, mais on peut espérer une parution d’ici la fin de l’année.

[youtube]dzp9VK-WW6k[/youtube]


Le projet de la semaine //

Deux projets d’envergure ont marqué la dernière semaine : Zoklo d’Obia le chef et Trèdou de Vendou. Alors que le premier frappe par la richesse des rimes, la diversité des flows et la profondeur des textes de son auteur, le deuxième impressionne par son ambiance générale, d’une douceur fortifiante et d’une uniformité épatante.

Mentions à Polyester de Sadam Huss’, probablement son meilleur projet solo en carrière, et à Ultraviolet de la chanteuse/poète/narratrice Xela Edna et du producteur Eius Echo, un quatre titres captivant qui allie pop, hip-hop expérimental et R&B avec ingéniosité.


La chanson de la semaine //

Trois coups de cœur : la saisissante complainte Navette d’Obia le chef produite par High Klassified, l’accrocheuse bombe trap/R&B Word for Word de Speng Squire produite par Austin J et le tour de force 5 minutes de rap de Sadam Huss’ produit par lui-même et Djazo.

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L’instru de la semaine //

Après en avoir lancé un premier extrait il y a quelques semaines, Franklin Would dévoile l’entièreté de Yeah I Would! Vol. 1, une beat tape funky présentée comme une seule longue pièce de 18 minutes. Épaulé par Mark The Magnanimous au mixage/matriçage et Glouton à la coproduction de la deuxième piste, le beatmaker montréalais témoigne de sa créativité et de son savoir-faire.


Le clip de la semaine //

Deux clips à la mise en scène originale ont marqué les derniers jours : Get It Right de Naya Ali (réalisé par Le GED) et Mailler d’Obia le chef (réalisé par Xavier MC).

[youtube]6UkRD4ZVUHU[/youtube]

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Les spectacles à voir //


OUMF 2019 – Le festival de la rentrée !

Une bonne partie de la crème de la scène hip-hop québécoise sera rassemblée durant le festival OUMF. On pourra notamment y voir Brown Family, Vendou, Kevin Na$h, Tizzo, Rymz, Loud, Naya Ali et Kirouac & Kodakludo.

Quartier latin (Montréal), du 5 au 7 septembre

Spectacle Alaclair Ensemble – 20$

Alaclair Ensemble donnera un spectacle intime sur un court de basket dans le cadre du tournoi B3 Montréal, juste avant la finale des femmes.

1814 rue de la Gauchetière E. (Montréal), 7 septembre (20h)

5sang14

5sang14, le collectif composé de Lost, Gaza, Random, MB et White-B, s’en va en Estrie pour donner l’un de ses plus gros concerts à vie.

Théâtre Granada (Sherbrooke), 6 septembre (20h)

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